dimanche 8 septembre 2013

Brazil 8/14. Ilha de Marajó









Du sable s’étend à perte de vue.

Il vagabonde si loin dans le paysage que l’horizon n’existe plus, 
la séparation entre ciel et terre n’a plus lieu d’être, le jaune du sable 
se mêle au blanc du papier, créant un paysage au sein même du vide.

Un seul élément vient rompre avec ce monochrome naturel. C’est une 
barrière de graphite, représentant des morceaux de bois, érigés les uns 
à coté des autres autour d’une porte archaïque. L’homme comprend qu’il 
est dans le désert. Ce carnet regorge décidément de mille et unes merveilles. 
Il pense durant quelques instants à ce qu’il a pu voir jusqu’à présent et 
imagine avec joie ce qu’il va voir par la suite. Mais pour voir, il faut se 
déplacer. C’est ce que décide de faire l’homme.






Le décor se trouble ainsi, laissant place à une autre étendue de sable, 
dans un lieu différent. La barrière boisée n’est plus là, remplacée par 
une barque aux couleurs flamboyantes et irréelles.
L’homme se souvient à présent. Ce sont les guides qui l’ont mené ici. 
Il a traversé avec eux un désert de sable, marchant durant un temps 
indéterminé dans ces plaines minérales pour s’établir sur cette plage, 
aux confins d’un village étranger. Mais le village, ils ne l’approchent pas, 
préférant converser avec les éléments naturels qui parsèment les lieux. 
C’est sans doute une bonne décision, il n’en sait rien à vrai dire. 
Cela ne le préoccupe pas.







A coté de la barque échouée – elle attend que la marée remonte et lui 
permette de flotter à nouveau – se trouve leur campement, à l’homme 
et aux guides. Ils l’ont construit d’une décision commune, utilisant les 
divers éléments qu’ils pouvaient recueillir aux alentours : bouts de bois, 
feuilles de palmiers, mousse et sable. C’est un lieu agréable. Il est retiré 
des bruissements incessants de la civilisation humaine. Les seules traces 
sont cette barque et un bateau laissé à l’abandon, un peu plus loin 
au milieu de la mangrove.

Cette attente sans but laisse du temps à l’homme pour penser à son 
voyage, à la création de cette mémoire représentée dans le carnet noir. 
Il se demande si, au fond, ce ne sont pas ses propres visions, oubliées 
et perdues au fin fond de son esprit, qui y sont dessinées page après page. 
Mais aucune réponse ne parvient à ses oreilles. Tout est trop calme.






Est-ce que c’est cela voyager ? Vagabonder d’un lieu à un autre en 
ne restant que spectateur, que découvreur passif d’une nouvelle réalité. 
Depuis quelques jours, il ne saisit plus très bien son rôle dans ce périple. 
Dans quel but emmagasiner toutes ces images ? Ne faut-il pas les vivre 
plus tôt ? « Je ne parviens à rien, mais cela ne m’attriste pas, c’est étrange » 
se dit l’homme, il n’avait jamais connu cela auparavant.

« Peut-être devrais-je malgré tout laisser une trace de mon existence 
au sein de ces images, autant qu’elles laissent une trace de la 
leur dans mon esprit. » conclut l’homme.

Puis il se concentre sur l’observation d’un arbre en face de lui, laissant 
son regard se perdre entre les tumultueuse racines apparentes qui se 
rejoignent pour se dresser vers le ciel. 
« Il laisse sa trace dans le monde, lui », se dit l’homme.








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